Bernadette et l'art...

Bernadette s'éloigne subrepticement du groupe dont elle fait partie, la guide l'ennuie profondément, elle se sent larguée au milieu de tous ces érudits, ses pieds la brûlent, ses mollets tirent, elle a soif.

Voici que son groupe quitte la salle, mais elle ne s'en aperçoit même pas. Les yeux dans le vague, elle fait semblant de s'intéresser au tableau dont elle a déjà capté tous les détails de chairs et de décors depuis longtemps, la guide a passé tant de temps à leur expliquer les pleins et les déliés, la symbolique, les couleurs, la lumière, et tutti quanti, bref rien qu'à l'idée de voir un tableau supplémentaire Bernadette en a la nausée.

En plus ces hommes ne sont pas très bien pourvus par Dame Nature, son mari en a une beaucoup plus importante. Elle plaint les compagnes de ces modèles.

Comme elle est nouvelle dans ce club d'amateur d'arts, personne ne s'aperçoit qu'elle a déserté.

Paul qui squattait le groupe depuis un quart d'heure est le seul à avoir remarqué le manège de notre amie. Lui aussi, il trouve cette guide trop scolaire, pas glop et il comprend la réaction de cette femme.
Il s'assied doucement sur la banquette derrière Bernadette, sans la toucher, juste assez près pour sentir son parfum, écouter le bruit discret des chaussures qu'elle ôte partiellement pour être plus à l'aise. Cela le fait rire.

Puis, voyant que tout le monde a quitté la salle, c'est presque l'heure de la fermeture, Paul pose son guide à ses côtés et mine de rien s'enfonce plus en arrière sur son assise. Voici qu'il touche les cheveux de Bernadette, effleure ses épaules. Puis il s'appuie plus généreusement et Bernadette fait de même.

Voici comment deux personnes qui ne se connaissent pas trouvent le moyen de s'épauler pour se reposer.

Le plus naturellement du monde, Bernadette se tourne lentement vers Paul et lui dit:
- Je crois que le musée va fermer.
- Oui, si nous allions boire un café?
- Avec plaisir, j'en ai marre d'être enfermée.

Les voici maintenant à la terrasse d'un café, en train de se raconter leurs vies. Ne sont ils pas mignons?

Si, ils sont vraiment mignons, et j'aime la façon que tu as de nous dépeindre ta pensée vis à vis de ce tableau. J'aime bien aussi le fait de nous impliquer dans le récit en disant "le manége de notre amie". Bien joué !