Inclure :
Perpétuel, Jaune, Petit Pot de Beurre, Cadenas, Valet, Fantastique, Bombarder, Tandem, Lumière, Fatidique, Hiver, Mouiller, Contribuer, Elaborer, Route.
La force du silence
Il est 7h00, je mets des bûches de pin sec sur les braises de la veille, ainsi à mon retour la pièce sera chaude. Nous sommes en Hiver 1944, la neige a déjà recouvert une partie des campagnes, et le froid cette année se montre aussi rude que le climat politique, le village est encore calme, au repos, tapis par le couvre feu imposé par les Allemands, nous avons peur, très peur, ils sont partout, cachés derrière chaque arbre, chaque fenêtre, chaque porche, prêt à fusiller le moindre mouvement.
Je regarde un fois de plus nerveusement la grande horloge du salon, j'ai encore le temps, la sirène donnant l'ordre aux villageois de pouvoir sortir ne retentira que dans 1h00. je m'assois donc dans le fauteuil, mon bol de café à la main, regardant les flammes prendre doucement les grosses bûches sèches, à la radio le jazz valse avec des annonces clandestines. La guerre est partout, partout on nous le rappelle.
Ça y est, l'ordre est levé, la vie va à nouveau envahir les rues, déjà au loin on entend les enfants crier, chahuter sur le chemin de l'école. Ils sont la légèreté, le perpétuel reflet de l'insouciance de l'enfance, il y a comme ça des signes un peu partout qui donnent bien des espérances.
Je remonte mon col, le vent me pénètre jusqu'aux os, je pousse mon vélo, car une fois de plus la montée de la rue Belle Etoile a gelé dans nuit. Je marque une pose devant la façade de l'Hôtel d'Orsay, et au même moment, un valet ouvre la porte, deux officiers Allemands en sortent, ils sont là, stoïques, leur uniforme tiré à quatre épingles et dans leur yeux noirs une lueur brille, une lueur de haine et de mépris. Gauchement je monte sur mon vélo, je ne les regarde pas , je baisse la tête; la semaine dernière Mr Bulot, le boucher de la place du Marché a refusé de les servir,depuis nous ne l'avons pas revu, il a disparu, et nous ne le reverrons certainement jamais.
J'arrive bientôt rue Jules Verne, la Fromagerie du "Père Albert" ouvre ses portes, déjà des femmes rangées les unes derrière les autres attendent sagement, leur ticket de rationnement à la main. Elles viennent chercher un peu de beurre, de lait, un peu de n'importe quoi, mais manger coûte que coûte.
Je pose mon vélo, contre la grille jaune du numéro 56. Cette maison est fermée depuis 2 ans, elle était la propriété de Mr Blum, mais sa religion et la folie des Allemands lui ont été fatal. A cette époque, Il décide de partir une nuit avec toute sa famille, au petit matin, non loin de la frontière, une troupe de soldats Allemands les interpelle et les tue froidement pour montrer l'exemple.
Je me mets à la fin de la file, je suis le seul homme au milieu de toutes ces femmes, mais elles ont l'habitude de me voir parmi elles, chez le boucher, le boulanger. Je ne suis pas parti à la guerre, une malformation de ma main gauche me vaut d'être réformé, alors pour me rendre utile et pour contribuer moi aussi aux idéaux de la nation, je livre aux personnes qui vivent dans les campagnes reculées, un peu de sucre, un peu de sel.
Mme Bergamote, la femme du docteur est devant moi, elle me glisse un timide sourire, je la regarde gentiment, mais comme elle a changé, elle d'habitude si bien habillée, parfumée comme une femme du monde, elle est là, pâle, les cheveux encore mouillés, ratatinée contre son sac. La guerre n'épargne vraiment personne.
Mr Albert en me voyant ouvre la porte de sa réserve, allume la lumière et disparaît dans une odeur de fromage et de crème, il revient avec dans les bras un carton de petits pots de beurre joliment refermés par un tissu brodé, je lui tends mes tickets –" A bientôt mon petit gars" me lance t'il affectueusement.
J'attache délicatement mon carton sur le porte bagage et prends la route des campagnes.
Il est maintenant 9h00, le soleil fait briller les feuillages et les longues herbes hautes du bord du chemin, pas un bruit, pas un mouvement, seuls les grincements de ma chaîne de vélo viennent rompre le fantastique calme de la nature.
J'arrive enfin au carrefour des "Quatre Platanes " j'aperçois au loin un tandem, c'est le menuisier Mr Durondin et son apprenti, on se salut gentiment d'un signe de la main, il m'annonce la présence d'un barrage de soldats à peu près à la hauteur du Moulin de la Joliette.
" Je ne vais jusque là, je m'arrête à la ferme des Alouettes" lui dis-je
" Et puis après, on a nos papiers, on ne fait rien de mal, on essaie un peu de travailler avec cette guerre de misère" me répondit il un las de tout ça
Enfin, me voilà arrivé, le grand portail d'entrée en dit long sur la richesse certaine de cette ferme avant la guerre, mais une bombe ou une échauffourée a eut raison d'une partie du mur, un trou béant rend bien dérisoire l'immense cadenas encore accroché entre les deux grilles.
Je laisse mon vélo sous le tilleul, lui au moins ne porte encore aucuns stigmates de la guerre, je détache mon carton et me dirige vers la bâtisse.
Un homme d'une quarantaine d'années m'ouvre la porte, " t'as vu personne ?" me dit il d'un son sec et clair.
Je lui raconte rapidement ce que vient de me dire Mr Durondin, dépose sur la table de la cuisine le carton des petits pots de beurre, accepte le verre d'eau qu'il venait de me proposer et me dirige vers la porte pour repartir.
"Ca y est, maintenant c'est sûr on va tout faire sauter me dit t'il en m'attrapant l'épaule. Je lui tends la main pour le saluer et je sorts le cœur léger et même soulagé que ma matinée se termine aussi bien.
Je le sais parfois dans les sacs, les pots et même les pains de campagne que je livre, on y dépose des messages secrets, de ceux qui servent à élaborer, des plans, des manœuvres pour riposter ou bombarder l'ennemi, je le sais comme je sais se que j'en courre si un jour un barrage Allemand ouvre mes sacoches ou fouille mes sacs Mais je ne peux pas tolérer cette emprise tyrannique et meurtrière qu'il nous font subir, alors à ma manière j'aide mon pays, je résiste contre la peur et contre la haine en attendant la date fatidique de la libération.
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Jeu 2 Mar - 17:47
