" Faille, Ascenseur, Nougat, Rhumatisme, Valide, Mature, Conspiration, Scolaire, Caoutchouc , Alerter, Carcasse, Nomade, Rêver, Perchoir, Tubercule."
Dimanche 12 avril à 11h00
Je suis à l'heure, il est 11H00 pile, j'ai garé ma voiture sous le prunier, à en croire toutes les voitures stationnées devant la maison je ne suis pas la première.
La Clio grise est à mon oncle René et à sa femme Giselle, le Brake Honda a mon frère que dieu me préserve, la dernière Citroën bleu clair, est à ma mère, la bicyclette rouge à mon père, mais ça ne compte pas ce n'est pas une voiture, et puis de toute façon nous sommes chez lui. La mini est à "elle", je ne vois que ça! Et la très belle quatre L nouvelle version lifting de voiture gentes chromées, et sièges en velours, est à MOI! Ma grand-mère est là aussi, je vois sa canne devant la porte, c'est suffisant pour traîner sa carcasse jusqu'ici, vu qu'elle loge dans une partie du rez-de-chaussée de la maison …
Le jardin est splendide mon père adore jardiner, "elle" je ne sais pas, mais ça m'étonnerait. Je vais passer une journée à la campagne dans la maison ex-familiale, même si tout le monde fait comme si nous n'avions rien changé depuis le divorce de mes parents adorés il y a maintenant 4 ans. Avant de passer l'entrée, je vais dire bonjour au jardin, juste histoire de lui rappeler que c'est moi qui ait trotté dans ses petites allées, c'est moi qui cueillait les fleurs interdites, déterrait les tubercules et les bulbes de tulipes, c'est moi qui trouvait les meilleures cachettes." Hein! tu te rappelles toi que c'est moi la fille de ce jardin ??? " Après ces retrouvailles botaniques, qui ne font que me donner encore plus le bourdon, je m'encourage à franchir le cap des bonjours, "comment vas-tu, ma chérie, comme tu es belle". Je sais c'est gentil, c'est mieux que "dégage fille indigne, tu aurais pu mettre un autre pull…" Mais moi je ne suis pas d'humeur, je n'y crois plus à cette famille, c'est comme pour le père Noël en plus douloureux, .….
Je ne sais même pas pourquoi nous nous retrouvons tous aujourd'hui chez mon père, c'est tout de même pas l'anniversaire de …… Si justement c'est celui de ma mère, le 12 avril c'est l'anniversaire de ma mère du moins je crois.
La main paralysée sur la poignée, la gorge nouée, les idées plus noires que jamais, je recule d'un pas. Pourquoi diable fêtent-ils les 50 ans de ma mère en famille recomposée… OUPS 50 ans ! C'est comme 30 ans mais en plus vieux. Les dizaines c'est mortel surtout quand c'est la moitié de 100 et que je n'ai pas fait de cadeaux. Je ne peux même pas dire que c'est une conspiration ou un coup monté, je suis foutue, je vais être définitivement déshéritée. Ils vont tous me regarder comme si j'avais une faille irréparable, un demi cerveau, l'affectif d'un demi caillou.
Il est 11h10 je ne suis toujours pas en retard mais ça ne va pas tarder. Je retourne vers ma 4L, si je résume la situation je dirai que nous sommes dimanche, à part les boulangeries tous les commerces sont fermés, à moins que je n'offre à mère un sac de chou choux à la crème. Et là il ne faut pas rêver, à 11hOO passé ils n'en n'ont plus! Je mâchonne nerveusement mon porte clés en caoutchouc faute de ne pas pouvoir sucer mon pouce à cause du vernis amère que je me suis badigeonnée avant hier! Je ne suis vraiment pas mature mais je m'en fiche, de toute façon je ne suis pas responsable si je suis restée bloqué dans l'ascenseur de la vie. Y'a un truc que je n'ai pas digéré, quand je serai quoi, est-ce que ça ira mieux pour autant ?
J'ai beau chercher une échappatoire je ne trouve aucune autre solution que d'affronter la meute, les mains vides, l'air de rien, en sifflotant. De toute façon ils me prennent ou ils me laissent ? Finalement je ne sais pas laquelle de ses deux alternatives me ferait le plus plaisir.
Je ressorts de mon carrosse, et je décide de faire mon entrée en scène, il est 11h25.
-Bonjour tout le monde, désolée pour le retard !
-Nous commencions juste à prendre l'apéritif ma chérie.
-tu arrives à point nommé Lucille, vient un peu embrasser ton oncle, ma beauté.
Je regarde les canaris dans leur cage, ils chantent, ils volent d'un perchoir à un perchoir, ils bouffent, ils chient, tout va bien !
-Joyeux anniversaire maman
SILENCE! Je vis le silence, un silence qui ne dure pas plus de 10 secondes. Qu'est-ce que j'ai encore dis, pourquoi est-ce qu'ils me regardent tous comme si ils étaient bêtes ?
-Tu es marrante Lucille, me fait-"elle"
-ah oui et pourquoi est-ce que je suis marrante…
RIRE! Je les vois tous se mettre à rire, ils se fendent tous la poire, même mon frangin!
Il est 11h35, et je me demande quel jour nous sommes?
-Allez viens embrasser ton père, ma lulu
Du coup je fais le tour et j'embrasse tout le monde même "elle", je fais le nomade qui s'arrête d'un bivouac à un autre. Au passage mon frère me chuchote à l'oreille
-t'en manques pas une! Tu sais que tu as 1 mois d'avance sur l'anniversaire de maman?
-bien sûr que je le sais ! qu'est-ce que t'es resté scolaire mon pauvre Franck!
Pourtant je déteste les gens de mauvaise foi, ils sont capables de nier tout ce qui les dérange et en plus ils vous font passer pour un débile, mon frère fait parti de cette race à part, il ne supporte pas d'avoir tort, sa vanité ne le souffre pas! Il est de surcroît jaloux et d'un égoïsme maniéré qui me donne la gerbe. Cette fois je viens de le battre sur son propre terrain, je vois à son regard rancunier qu'il m'attendra au tournant dés que l'occasion se présentera. Pour le moment j'éprouve tout de même un grand soulagement car j'ai encore un mois avant de trouver un cadeau pour ce foutu anniversaire, en pleine repossession de mes moyen je lance discrètement à mon frère :
-tu ne me fais pas peur Microbe
-qu'est-ce que tu dis ?
-Je disais tu aimes bien ma robe ?
Je n'ai pour toute réponse qu'un haussement de sourcils hautain.
-Ta robe est charmante, Lucille, on voit tes jolies jambes, les filles d'aujourd'hui ne savent pas se mettre en valeur.
Si ma grand-mère à des rhumatismes par contre elle est loin d'être sourde, ce qui valut plus d'une fois à ma mère à l'époque où elle et mon père n'étaient pas encore divorcés d'avoir l'impression d'être sur écoute. Ma grand mère et sa belle fille entretenaient des relations de bon voisinage, sans plus. Pour ma part j'épouserai un orphelin, m'étais-je promis à 15 ans. Mon père n'a jamais vraiment coupé le cordon avec sa mère, sa mère se considérait comme l'unique femme de son fils, ma mère comme la mère de son mari, quant à moi ma place n'était défini qu'en fonction de ce sac de nœuds.
-Merci mémé, toujours aussi pimpante à ce que je vois.
-Et toi ma petite fille, comment se passe ta première année aux beaux arts?
-Très bien, j'adore ce que je fais et ….
-Giselle tu peux me faire passer les nougats qui sont devant toi ! m'interrompt ma grand mère.
Mais que je suis bête mais que je suis bête, mais que je suis bête. Je me fais avoir à chaque fois, en général quand on me pose une question sur ma vie, ce n'est pas pour obtenir une réponse, je devrais le savoir depuis le temps, comment est-ce que je n'ai pas senti le coup venir?
-Oui j'adore ce que je fais et en parallèle je tapine pour arrondir mes fins de mois!
-Lucille ne parle pas ainsi ! tu as des soucis en ce moment, je te trouve un peu sur tes gardes, ma chérie quelque chose ne va pas ?
-Je vais très bien maman.
-On ne dirait pas!
-si je t'assure!
-bon puisque tu le dis, mais on en reparlera!
J'aimerai alerter la police pour mal traitance sur personne en danger! Parce qu'ici personne ne vient à mon secoure! Ma tante et mon oncle sont quasiment mués de naissance, mon frère me déteste parce que je le dérange, mon père n'a d'yeux que pour "elle" il ne cultive plus que sa libido pour retarder l'heure de sa vieillesse, ma mère est encore enceinte de moi, une longue gestation de 22 années.
Et moi et moi et moi….
Il est Midi et demi, encore au moins 3 heures avant de rentrer chez moi.
Je laisse passer les heures, j'interviens dans les discutions uniquement pour acquiescer, mon père aimerait qu'"elle" et moi nous devenions bonnes amies, c'est vrai qu'"elle" est sympa, ça aurait pu être ma petite sœur, c'est tout dire. En attendant je m'amuse plus avec "elle" qu'avec le reste de la famille. Cette journée aura au moins servit à me faire une nouvelle copine, même si c'est ma belle mère et qu'elle pourrait être ma sœur, ça coince encore aux entournures!
Je nous regarde l'air de rien, tout semble pourtant serein, une famille presque ordinaire, du moins moderne, rien ne laisse supposer mon ennuie intérieur, ma lassitude toujours aussi valide et tenace! Si ce n'est que j'ai oublié que le 12 avril c'est le jour de mes 23 ans, et que nous sommes tous réunis pour fêter mon anniversaire, décidément que puis-je leur reprocher ?
Chaperonvert de campagne
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Sujet: Le dimanche 12 avril 
Ven 3 Mar - 19:21
