Regain
Viens, allons batifoler dans les regains d’après l’orage, aux senteurs opiacées de foin et d’herbes grasses pleines de terre mouillée, qui encensent l’espace, et nous font chavirer le cœur dans un doux spasme. Il n’est point de ciel noir qui ne donne lueur, éclaircie d’un moment, ou soleil pour la vie, il n’est point d’averse, de crachin de mousson, qui ne cessent un instant, qu’il soit court ou bien long.
Viens, prend ma main, trempons nos mollets nus aux herbes ruisselantes, dans l’atmosphère émue d’un renouveau tombé du ciel. Traversons ensemble cette brume soudaine que nos amours encensent, comme à l’église les encensoirs parfument et cachent les travées noires et froides aux âmes torturées, sous le regard divin d’un Christ crucifié qui jamais ne dit mot aux hommes qui se fâchent.
Avance, confiant, serein, ta main dans la mienne. Ne te retourne pas dans le long escalier qui va vers la lumière, Orphée l’a déjà fait et il a tout perdu, sa quête a été vaine.
Aimes toi comme je t’aime, apprends la résonance de ton rire en écho, il reviendra lui-même, nourrissant un coin chaud en toi de ton enfance, et fera croître, dés aujourd’hui ce que tu sèmes.
C’est le temps des labours et tout est retourné. Avances. Et si le soc est lourd, regarde le sillon frais, prometteur de moissons grasses, quand ton deuil sera fait. Je t’attends là, sous le pommier, j’ai un panier à partager, plein de fruits frais, dessous l’ombrage